Français, encore un effort si vous voulez être républicains

Donatien Alphonse François de Sade est un écrivain français né le 2 juin 1740 et mort le 2 décembre 1814. Après de solides études, une bève carrière militaire, il entame une vie d´aventures, jalonnée de scandales, d´arrestations, de procès perdus et d´évasions. Au seuil de sa vie, il a été condamné à mort à deux reprises, a été poursuivi et emprisonné sous tous les régimes et a passé plus de trente ans derrière les barreaux ou interné comme aliéné. Mais Sade n´est pas fou…

Il nous laisse une œuvre littéraire considérable, publiée sous la Révolution, le Consulat et l´Empire, puis au XXe siècle. Il a composé une douzaine de romans, la plupart de vaste dimension, une soixantaine de contes, une vingtaine de pièces de théâtre, de nombreux discours et pétitions ainsi qu´une correspondance nourrie. Un quart environ de ses manuscrits a été détruit par la police du Consulat et de l´Empire.

Enfermé plus de la moitié de sa vie d’adulte, Sade laisse son imaginaire explorer jusqu´au délire un monde de volupté et de violence tout en faisant de ses personnages les porte-parole d´une pensée politique, sociale et philosophique purement révolutionnaire. Sade utilise l´érotisme et l´outrance, il choque, il horrifie le lecteur pour retenir son attention et le contraindre à réfléchir. En cela, il est bien plus subversif qu´obscène, et plus dangereux pour une société agonisante dont il ne reconnaît plus les conventions et les simulacres sociaux et religieux.

Sade se montre un matérialiste convaincu et se proclame « athée jusqu´au fanatisme ». Gilbert Lely dans sa Vie du marquis de Sade interprète son athéisme comme « une égale et furieuse réprobation de tout ce qui représente à ses yeux une entrave à la liberté native de l´homme, qu´il s´agisse d´une tyrannie d´ordre religieux, politique ou intellectuel ». Cette soif de liberté fait de lui un chantre d´une république strictement laïque, à laquelle il réclame des « lois… si douces, en si petit nombre, que tous les hommes, de quelque caractère qu´ils soient, puissent s´y plier. » et interdit de se mêler de la vie des citoyens, hommes ou femmes, à égalité de traitement. Vous avez dit moderne ?

Sade jouit du redoutable privilège d´avoir un patronyme associé dans le langage courant à toutes sortes de perversions. Son œuvre mérite de dépasser ces préjugés pour découvrir un écrivain à la langue magnifique, un provocateur à l´humour (très) noir, un philosophe subversif, un homme libre. Non, Sade n´est pas fou !