Félicia ou mes Fredaines

André-Robert Andréa de Nerciat est un aventurier et romancier français, connu pour ses œuvres libertines. Il naît à Dijon en 1739 et meurt à Naples en 1800.

 À vingt ans, il rejoint l’armée. Rendu à la vie civile fin 1775, il mène alors des missions secrètes. Homme impécunieux mais pragmatique à une époque politiquement troublée, il est difficile de connaître avec certitude contenu et commanditaires de ses missions. Entre 1780 et 1783, on le retrouve bibliothécaire, puis intendant des bâtiments de princes allemands. En 1783, la France l’envoie en mission en Hollande. Son rôle pendant la révolution reste incertain : émigré, espion, pour qui ?, « qui ? » s’entendant au pluriel ! Après maintes péripéties, le voilà à Naples auprès de la reine Caroline : en février 1798, elle l’envoie auprès du pape, au moment même où Rome tombe aux mains des armées françaises. C’est le coup de trop. Il croupit dans un cachot du Château Saint Ange au-delà de l'évacuation de Rome par les Français. Enfin élargi, vers 1800, il retourne à Naples, où il meurt des suites de sa détention, dépouillé de tous ses papiers, parmi lesquels se trouvaient, peut-être…, les manuscrits de quelques ouvrages.

 La littérature est précisément la seule fidélité qui a accompagné sa tumultueuse existence. C’est un lecteur passionné et un auteur de romans libertins, pour l’essentiel. À partir de 1775, il connaît son plus grand succès avec Felicia ou Mes Fredaines. S’ensuit une série d’œuvres de même nature sans qu’aucune n’atteigne le succès de Felicia. Son roman posthume, le Diable-au-corps, qualifié par un biographe du XIX^e siècle d’« ouvrage infâme par son obscénité » met la touche finale à sa réputation sulfureuse.

 Pourtant, Nerciat ne la mérite pas. Bien au contraire, il a le libertinage « joyeux ». Ses œuvres présentent un subtil dosage d'humour, d'évasion et d'élan charnel ; chez lui, nulle trace de violence, de domination ou de cruauté. En cela, ses œuvres s’opposent diamétralement à celles de Sade. Là où le marquis est le seigneur d’un sombre crépuscule, Nerciat est le maître d’une aube rieuse. À la suite de Stendhal, Apollinaire ou Baudelaire, il faut découvrir ce « psychologue subtil et raffiné, esprit dégagé de tous les préjugés » (Apollinaire).